Plasturgie et composites : entre transformation et consolidation

La plasturgie et les matériaux composites sont omniprésents dans notre quotidien, des pièces aéronautiques aux emballages alimentaires, en passant par l’équipement automobile. Pourtant, cette industrie est en pleine mutation ! Entre évolution technologique, consolidation du marché et défis environnementaux, Thierry Satgé, expert du secteur et senior advisor chez MBA Capital Strasbourg, nous éclaire sur ces transformations.

Un parcours ancré dans l’industrie des matériaux

Ingénieur de formation, Thierry Satgé a passé quarante ans dans l’univers des plastiques et composites, occupant divers postes, du bureau d’études à la direction de groupe, tant dans des grands groupes que des PME, voire des start-up. Son expertise couvre l’ensemble du spectre : « J’ai travaillé aussi bien sur des composites hautes performances pour la construction navale que sur des plastiques injectés en grande série pour l’électroménager. »

Cette vision d’ensemble lui permet de décrypter les évolutions du secteur, en particulier la disparition progressive des frontières entre plastiques et composites. « Historiquement, les plastiques étaient considérés comme moins performants mécaniquement, tandis que les composites, renforcés, servaient pour des pièces structurelles. Aujourd’hui, la distinction s’estompe avec l’émergence de nouvelles résines et techniques de production. »

Une industrie sous pression mais résiliente

Depuis quelques années, le secteur fait face à une double pression : réglementaire et sociétale. Le « plastique bashing » affecte principalement l’emballage, mais selon Thierry Satgé, il s’agit d’un débat biaisé : « Il faut arrêter d’assimiler tous les plastiques à un problème environnemental. Ce qui est critiquable, c’est le suremballage, pas l’emballage en soi. » Il insiste aussi sur les progrès réalisés en matière d’éco-conception et de recyclage : « L’Allemagne, par exemple, utilise des bouteilles en plastique plus épaisses, mais consignées. Résultat : pas de déchets, un vrai cycle vertueux. »

Au-delà de ces controverses, l’industrie continue d’innover et de se structurer. « L’aéronautique a été un moteur d’industrialisation pour les composites. Le secteur automobile, lui, a été précurseur dans l’industrialisation des procédés d’injection thermoplastique mais tarde à se mettre dans la transformation des matériaux composites, faute de process suffisamment robustes », explique-t-il. Le bâtiment, quant à lui, profite largement des avantages des plastiques et composites pour des applications diverses, de l’isolation aux équipements sanitaires.

Un marché en consolidation

Le marché de la plasturgie et des composites est constitué en grande partie de PME, souvent dirigées par des entrepreneurs issus du métier. « Beaucoup d’entre elles ont été créées dans les années 70-80 et arrivent aujourd’hui au moment de la transmission. La nouvelle génération est moins encline à reprendre ces structures, ce qui pousse donc à une consolidation du marché », observe Thierry Satgé.

Selon lui, cette concentration est une opportunité et est vitale pour le secteur : « La consolidation permet de structurer le secteur, de gagner en compétitivité et en innovation. On l’a vu avec des acteurs comme PLASTIC OMNIUM dont la trajectoire est impressionnante sous la houlette de la famille Burelle, qui ne vend plus seulement des pare-chocs, mais des systèmes complets intégrant électronique et capteurs. » Il souligne aussi l’importance de la transmission bien préparée : « Les dirigeants de PME doivent anticiper leur départ en formant leurs équipes et en préparant l’intégration de nouveaux investisseurs ou acheteurs. »

De nouveaux défis et opportunités

Ce que l’on peut dire, c’est que l’avenir de la plasturgie, plastiques et composites inclus, repose sur plusieurs leviers : industrialisation, montée en gamme et intégration de nouvelles matières. « Il ne faut plus être un simple « pousseur de matière » et être juste dans l’injection. Les entreprises doivent se positionner comme fournisseurs de solutions complètes, avec plus de valeur ajoutée », insiste l’expert.

Par ailleurs, l’innovation repose de plus en plus sur la substitution des matériaux traditionnels. « Qui aurait imaginé, il y a 20 ans, que des tronçons entiers d’un Airbus A350 seraient en composite ? », illustre-t-il. Cette tendance va se poursuivre, notamment avec l’arrivée de fibres naturelles comme le lin, qui prouve la sensibilité des acteurs aux enjeux environnementaux, et de nouveaux procédés comme l’impression 3D composite ou le moulage haute précision. « L’enjeu aujourd’hui, c’est d’adapter ces innovations à l’échelle industrielle et de garantir leur viabilité économique. »

Last but not least, le secteur doit aussi faire face à un défi majeur : le vieillissement des machines et l’optimisation des processus industriels. « L’investissement dans l’industrialisation est clé pour éviter que le secteur ne reste trop artisanal, notamment du côté des composites. L’aéronautique a montré la voie avec des process robustes. Il est plus que temps que l’automobile applique aux composites les méthodes qui ont fait son succès dans les pièces plastique, et que d’autres secteurs suivent ! »

Un regard sur les marchés européens : l’Allemagne et l’Italie

Étant donné son parcours, Thierry Satgé pose également un regard aiguisé sur l’organisation et les problématiques du marché qui diffèrent selon les pays européens. En Allemagne, on retrouve un tissu industriel puissant composé d’entreprises familiales de taille intermédiaire, très bien structurées et disposant d’une avance technologique. « L’Allemagne a su protéger son marché en favorisant ses acteurs locaux et en imposant des standards très élevés. Ils ont une maîtrise industrielle impressionnante, notamment sur les résines et les procédés de fabrication », souligne Thierry Satgé.

À l’inverse, l’Italie est caractérisée par un réseau dense de TPE et PME, souvent familiales et très spécialisées. « Les Italiens sont des experts du sur-mesure et de la flexibilité. Ils savent tout faire, s’adaptent rapidement, et possèdent un savoir-faire artisanal très poussé. Mais ils ont plus de mal à industrialiser leurs procédés à grande échelle », explique-t-il.

Ces différences de structuration influencent les stratégies de croissance et d’investissement. « L’Allemagne a une vision à long terme avec un fort soutien de ses institutions, tandis que l’Italie mise plus sur l’agilité et l’innovation de niche. La France, quant à elle, se situe entre ces deux modèles, avec un tissu industriel qui cherche encore sa structuration optimale… »

Une transition à bien préparer

Pour les entrepreneurs souhaitant céder leur société, Thierry Satgé donne plusieurs conseils :

  1. Anticiper la cession : « ne pas attendre trop longtemps. Une transmission réussie, c’est celle qui se prépare en amont, en structurant l’entreprise et en sécurisant son management. »
  2. Structurer l’organisation : « une entreprise bien organisée, avec des équipes autonomes, rassure un repreneur. Si tout repose sur le dirigeant, la valorisation peut être impactée. »
  3. Investir dans l’innovation : « une entreprise en phase de cession doit montrer des perspectives d’évolution pour attirer les investisseurs. Un portefeuille produit dynamique et une capacité à répondre aux tendances du marché sont des atouts majeurs. »
  4. Soigner les finances : « Une entreprise en vente doit avoir des comptes clairs et une bonne rentabilité. Un business plan solide, détaillant les opportunités et risques du marché, est indispensable. »

Quant aux acquéreurs, ils doivent anticiper les évolutions du marché et ne pas se contenter de l’existant : « Il faut penser au-delà des simples chiffres et avoir un vrai projet de développement. La croissance ne peut être que double : organique… et externe ! »

Vers un avenir en mutation

Malgré les défis, Thierry Satgé est convaincu de l’avenir florissant de la plasturgie et des composites. « C’est un secteur clé qui touche tous les domaines, de l’automobile au bâtiment en passant par la santé. Avec l’innovation et la structuration du marché, nous sommes encore loin d’avoir exploité tout son potentiel. »

Le rôle clé de Thierry Satgé pour MBA Capital

Fort de son expérience, Thierry Satgé collabore aujourd’hui avec MBA Capital, où il apporte son expertise en analyse industrielle pour les opérations de fusion et acquisition. « Mon rôle est d’évaluer la viabilité des entreprises du secteur, en analysant leur positionnement sur le marché, leur capacité d’innovation et leur rentabilité industrielle », explique-t-il.

Grâce à son regard de praticien, il est en mesure d’apporter une lecture complémentaire aux financiers : « Les fonds d’investissement et cabinets de conseil en M&A ont besoin d’un œil d’industriel pour valider certains choix stratégiques. Une entreprise peut sembler rentable sur le papier mais être en difficulté si elle n’a pas les moyens d’adapter ses outils de production ou de se différencier technologiquement. »

Mis à jour le 6 mars 2025

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